Shadow : Quand le marketing achète la réalité

PC

Intro Maestro

C’est quoi Shadow ? Vous me répondrez machinalement que c’est une entreprise Française fondée en 2015, et qui a la particularité de fournir via le “cloud”  la possibilité d’avoir la puissance de frappe d’un PC à 1500 euros sur un vieux Mac Book d’y a 10 ans avec 15 Mb/s de connexion… Et vous me dites que vous ne croyez plus au Père Noel ? Sans compter ces lignes croustillantes, je cite: Shadow “c’est la garantie d’une expérience optimale, sans panne, sans lag, sans renouvellement coûteux de matériel” ou encore “fournir via le cloud une expérience identique ou meilleure que celle d’un ordinateur local”.

Qui est Shadow ?

Si je vous repose la question en vous demandant précisément comment tout ça marche, 90% d’entre vous (testé) vont hausser les épaules en me répondant que c’est l’époque et la magie du web…. La magie du web, nous en sommes donc réduit à cela ? De la technologie élevé au rang de religion, et dont les mécaniques seraient plus obscures que nos mythologies aux arcanes mystiques ? Cela en devient presque effarent… Peut être pas autant que le matériel utilisé ainsi que certains procédés plus que douteux concernant l’éthique, ou encore les méthodes de promesses criées aux quatre coins de la France, que ce soit dans la rue ou l’espace virtuel.

Justifier l'injustifiable

La première fois que j’ai entendu parler de Shadow c’était en 2016, un nombre limité de personnes furent sélectionnées pour un panel de tests, ainsi que faire la promotion du produit, que ce soit sur Twitch, Youtube, ou dans de gros médias tels que Le Monde ou Numerama, difficile pour vous d’échapper à cette vague dématérialisée. Ce qui interpelle en premier, c’est comment une petite entreprise Française peut faire mieux que Microsoft et sa section R&D ? Ou encore Sony, qui a mis 10 ans pour mettre au point la technologie rachetée à David Perry, fondateur de l’entreprise Gaikai transformée en Ps Now et qui a commencé sur ZX Spectrum… Comment peuvent ils faire mieux que Nvidia, leader dans le cloud et l’intelligence artificielle… Comment ?

Trop beau pour être vrai

En reposant une 3 eme fois la question de ce qu’est Shadow, personne n’est capable de déterminer qui en est à sa tête, combien d’effectif il y a derrière et pour terminer (le plus important) QUI sponsorise tout çà ? car ce n’est pas avec 100 000 euros voir même 1 millions que vous allez renverser la vapeur face à des entreprises qui en brassent des milliards au trimestre. Ce sont tous ces éléments réunis qui m’ont suffisamment intrigué pour entamer une recherche en premier lieu sur les performances obtenues, et second objectif, déterminer ce qui se passe derrière ce logo et cette promesse opaque : Obtenir le meilleur du matériel électronique sans en connaitre exactement la référence… Çà commence déjà mal pour un début.

Dans l'Ombre du doute

Viens le plus important: Le matos, c’est quoi qu’on nous vends exactement ? Car c’est bien ça que vous allez payer tous les mois 30 euros, donc je pense que c’est tout de même un facteur non négligeable à observer. Alors pour qu’on soit bien d’accord, Shadow vous permet d’avoir un ordinateur à distance, une machine virtuelle dédiée, dans un emplacement serveur lui aussi prévu à cet effet. Cet ensemble se composerais de notre bon vieux Windaube 10, mais surtout d’un processeur Intel Xeon (4 core physique et 4 core virtuel = 8 thread), d’une 1080 et enfin de 12 Go de ram… la carte mère ? La gamme de la ram ? Le modèle du processeur ? On vous répondra que c’est la technologie du futur haha… Si vous êtes ne serais qu’un tant soi peu amoureux de l’informatique et de l’électronique, vous allez vouloir forcément creuser pour savoir de quoi il en retourne, car c’est bien trop vague en terme de précisions.

Un début de piste

Quel type de processeur et de ram utilise Shadow ? Car me sortir un Xeon c’est bien jolie mais des Xeon il y en a de sacrées pelletées qui existent, donc la référence et ses caractéristiques techniques c’est quoi ? La réponse:  Intel Xeon E5 2650 … Donc la technologie du futur tourne si je comprend bien, sur un processeur qui en est à son 4 ème cycle de production, et une architecture touchée de plein fouet par les failles découvertes il y a peu… Fabuleux. Alors effectivement notre animal est composé de 24 cœurs physiques et de 24 cœurs virtuels… Sauf que les enfants, vous oubliez 3 facteurs fondamentaux; 1/ Le nombre d’utilisateur 2/ La fréquence, et enfin 3/ La Ram.

Oui parce que votre processeur (modèle V1 ou V4 ?) est partagé avec d’autres machines, votre pc est une machine virtuelle et non physique. Vient ensuite la fréquence: 2.2 ghz ou au mieux 2.9 ghz… Ce qui est très bas par rapport au marché qui franchi aujourd’hui facilement les 4ghz (i3 8350k). (le nombre de cœurs ne vaut que si la fréquence suit… 12 éléphants sont plus efficace que 48 fourmis…). Terminons par la ram, est-ce de la DDR3, de la DDR4 ?  Sachant que celle-ci est partagée entre les machines comme le processeur, et que la base du marché ce situe aujourd’hui à 2100 mhz (local)… Sans compter qu’elle vas encore évoluer dans les 2 ans à venir.

PC VS Streaming

Plus on plonge dans l’aspect technique, plus on a cette impression de malaise lattant, celle d’avoir un produit bien loin de la réalité ou en tout cas, de comment il est vendu. Sans oublier la fameuse faille Intel, touchant toutes les architectures x86, Shadow n’est pas épargné, puisque ce CPU possède une architecture Intel en x86 justement, un modèle particulièrement touché de plein fouet vis à vis des soucis de performance rencontré sur le cloud par l’ensemble des acteurs du secteur (y compris Nvidia)… Et vient un autre point majeur; le codec de compression.

D’après les dires de Shadow, il emploie actuellement le codec H264, pour un envoi en 1080p, pouvant aller jusqu’à 1440p (selon le jeu). Déjà c’est bien beau de nous annoncer du H264 ou du H265 mais en quel niveau est il compressé ? En 4.2 ? Car pour ceux qui ne comprendraient pas, le H265 ne sert à rien pour ce qui est du 1080p, il devient un tout petit peu intéressant en 1440p (et encore), c’est en 4k que le codec prend tout son sens, car il est indexé avant tout sur la résolution. Donc vous allez me dire que c’est good ? Pas tout à fait….

Question sans réponse

Si je dis que le H265 ne sert à rien, c’est parce que Shadow ne vous propose pas (encore) de 4k, dans ce cas la du H264 suffit amplement… à condition de ne pas outre passer le 1440p (qui est vraiment limite), et de configurer un bon bitrate (flux video) pour avoir une qualité décente…. Sauf que, une qualité décente en bitrate c’est minimum 10 mo la seconde pour du 1080p… Reste a savoir qui se charge de l’envoi ? Le processeur ou la carte graphique ? Car le H264 a la fâcheuse tendance de demander 2 fois plus de ressources que le x264 (codec processeur) pour avoir la même qualité (à cause du flux de données moins compact). Un choix étrange de la part de ShadowSauf si c’est la carte graphique qui encode, ce qui serait culotté de faire payer au client une partie de la puissance utilisée pour renvoyer l’image sur son écran. Vient aussi un autre facteur qui change pas mal la donne: la résolution dynamique (ou qualité dynamique dans leur cas). Cette fonction est une calamité qui n’aurai jamais du exister… Elle est sortie des bureaux d’étude marketing américain pour faire baisser les coûts de production, mais avec la contre partie d’une qualité d’image jamais équivalente à sa résolution initiale, sauf en restant immobile… super.

Le Départ

Qui est Shadow (4 ème fois lol) ? Promis, je vous dis tout. Shadow fut fondé par 3 personnes, Stephane Heliot, Emmanuel Freund et son cousin. Des 3 personnes citées : C’est Emmanuel Freund que vous verrez dans les médias traditionnels (et les new’s technique sur YouTube), mais c’est à Victor Grimoin (Manager) que vous aurez affaire sur YouTube et le secteur jeunesse. D’ailleurs Victor Grimoin ne laisse rien au hasard: casquette à l’envers, langage djeunes, utilisant tous les codes des influenceurs (YouTuber, Réseau Sociaux, Blogueur etc… ), un communiquant implacable. Emmanuel Freund a su s’entourer de personnes qui sont soit énigmatiques, soit loin d’être des enfants de cœur.

Emmanuel Freund commence dans le digital à partir de 2004 à ISIDOR, spécialisée dans le secteur d’activité de l’édition de logiciels, d’outils de développement et de langages. Il y restera 9 ans (2004-2013) avant de claquer la porte et partir pour Doro AB où il sera manager. (C’est Doro AB, rien à voir avec AB1 x) Doro est une entreprise suédoise spécialisée dans le développement, le marketing et la vente de produits et de logiciels de télécommunication destinés, notamment, aux personnes âgées. Il partira au bout de 2 ans (2013-2015) pour fonder Blade; avec une idée bien précise: Le PC Next Gen, celui qui sera dans le cloud.

Shadow 1.0

Avoir des idées c’est bien, mais du pognon c’est mieux, et même si il parvient à convaincre un des meilleurs développeur de France (Qui ? Il a démarché un hacker sur linkdle ?) ainsi que 2 autres personnes (ce qui donne une équipe de 6), il manque une puissance de frappe en ce qui concerne l’aspect financier… D’après leurs dires, ils sont arrivés avec une machine valant 300 euros à la faire passer à un équivalent qu’il estime à 4000 euros grâce à Shadow… Et c’est là que vont intervenir 5 personnages clé dans notre histoire.

Nick Suppipat (Wind Energy), Michael Benabou (Vente-Privée), son ancien patron de Doro, Jerome Arnaud et enfin, le frère de l’ancienne Ministre de l’écologie Nathalie Kosciusko-Morizet, Pierre Kosciusko-Morizet (Price Minister). Ces 4 personnes mettent 3 millions sur la table pour sponsoriser le projet, désormais il n’appartient plus entièrement à Blade. D’ailleurs des anecdotes aussi loufoque qu’inquiétante, il y en as des tonnes au final autour du projet, je vais me contenter de quelque une trouvées sur le tas, et pour rester dans le ton de l’investissement, je vous laisse apprécier la tirade:

“Les articles pleuvent car nos investisseurs sont prestigieux, et de nouveaux investisseurs affluent parce que les médias sont élogieux. Personne ne comprend rien mais tout le monde est persuadé que ça marche.”

Ambition & Entretient

3 millions et quelques sponsors illustres c’est bien, mais 10 personnes, c’est pas le bout du monde, et c’est loin de convenir au projet d’envergure. S’ensuit donc la fameuse phase des entretiens, qui elle aussi a de quoi faire rire, ou au pire laisser pantois. Les candidats ne passe non pas 1, ni 2, ni 3, mais 10 putain d’entretiens, histoire de faire mieux que les 9 de Google (la fameuse : qui a la plus grosse). Et comment ne pas terminer sur le choix cornélien ? Après la première semaine d’embauche, on vous propose un chèque de 2000 euros et de partir de la boite, soit de refuser l’argent mais de rester et revenir lundi… Et ça marche, non pas parce que l’oeuvre est bonne mais tout simplement car c’est une technique de manipulation de marketing banal. Néanmoins ça fonctionne et l’effectif passe à 60 personne histoire d’assurer le maintient du projet, et la phrase lancée aux premiers investisseurs: Conquérir le monde (C’est à se demander limite si le type a pas abuser de Minus & Cortex plus jeune).

Esprit & Capitalisation

Alors je pourrai revenir facilement sur les nombreux couacs en communication, mais ça serai chiant et peu intéressant. Par contre, il y en a un qui m’intéresse dans le lot, c’est celui du capital. 3 millions c’est sympas, mais c’est encore trop peu pour espérez quelque chose de viable, tous le savent, les professionnels du secteur également. 51 millions vont venir ce rajouter en juin 2017 au 3 millions déjà existants mais partis en fumé depuis longtemps. Cependant si rembourser ou du moins, capitaliser 3 millions n’est pas chose aisée, je vous laisse imaginer 54 millions d’euros, avec Emmanuel criant sans relâche aux investisseurs qu’ils changeront de ton une fois le milliard de capitalisation en bourse atteins. Cependant tout n’est pas au beau fixe au travail, les horaires sont changeants, la méthodologie également, tout rythme structuré disparaît, les gens se lèvent pour l’entreprise, mangent à l’entreprise, et s’endorment en quittant à peine celle ci: Tout tourne autour d’elle.

Storytelling 2.0

Bien des choses sont différentes de ce qu’elles paraissent… Cependant pour faire en sorte que les promesses rejoignent la réalité, rien empêche votre porte monnaie de vous l’acheter… A conditions de savoir à qui s’adresser. Les influenceurs sont donc les premiers à être visés, peu sont au fait de comment fonctionne l’informatique, une démo soigneusement préparée (Aucune vidéo de Shadow n’est spontanée, tout est millimétré) permet de convaincre la plupart d’entre eux qui n’y voient que du feu, tandis que les plus fervents fidèles à la cause sont utilisés comme vitrine. Et c’est là où se rejoue le scénario du financement : personne y comprend rien, mais vu les personnes qui en font la pub, tout le monde en parle, et ça crée des émules.

De la petite streameuse, au créateur reconnu, difficile de passer au travers, tant les profils sont différent histoire de toucher le monde entier, voir la galaxie voisine sais t’on jamais. Le soucis en communication, c’est toujours de trouver le juste milieux entre le trop et le pas assez, et si beaucoup tombent dans le pas assez, Shadow même en étant très jeune a déjà réussit à saturer la France. E Penser, Hardisk, Taupe10, Poissonfaislecon (quoi ? Je l’aime bien), Neila, Luffy, et bien d’autres missionnaires prêts à porter la bonne parole jusqu’aux confins du trou du cul de la forêt tropicale… Ou alors ils ont touché du pognon dédiés à la partie communication… Allez savoir.

Les CGU de Orwell

C’est bien les superlatifs utilisés à outrance, une campagne de communication agressive, et l’opacité de la société qui m’a poussé à me pencher sur son cas… Cependant si vous avez prêté attention à ce que je disait, j’ai annoncé 5 personnes et n’en est cité que 4… Ce serai oublier la partie matériel, plus  importante encore que la partie communication (ça reste que du blabla). Car tout ce matos, faut il encore l’avoir à prix préférentiel, et c’est là que l’ensemble devient incongrue : c’est un responsable Intel qui fournit en sous marin tout le matériel à Blade, son nom: Grégoire Armand. Emmanuel Freund fais l’éloge de la personne en précisant que sans elle, rien de tout ceci serai possible, c’est vous dire l’importance du personnage.

Autre aspect qui a de quoi étonner : les CGU. 99% des gens ne les lisent pas, ça je suis bien au courant, mais c’est bien parce que ils ne les lisent pas que des choses aussi effrayantes peuvent voir le jour, on parle d’un contrôle total effectué sur vos données, je veux dire, si vous gueulez sur le fait d’être espionné par Apple et Samsung, eux au moins fournissent une fonction pour stopper le transfert des données, ici non. Outre le fait d’être scruté avec votre consentement, vous leur donnez aussi le droit d’exploitation sur celle-ci, y compris artistique, ce qui fera la joie je n’en doute pas de nos ami(e)s dessinateurs/trices and co, à l’heure ou 75% d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté.

CONCLUSION ?

(passer le curseur de votre sourie)
A l'heure où sont écrites ces lignes, Shadow à ouvert un magasin parisien et son offre au public, prétendant jouir d'un parc de 20 000 personnes. Cependant, cela forme un revenu de 600 000 euros (a cela il faut déduire les charges), loin des 67 millions qui doivent être rentabilisés, et où d'autres emprunts risquent de s'ajouter pour maintenir le matériel touché de plein fouet par la faille. Même si le H265 permettrai de fournir le service jusqu’à 5 mb/s, l'input lag et la qualité d'image reste insuffisant pour un certain nombre d'observateur du hardware, à commencer par le marché Américain, dont les premiers retour se sont montrés tièdes. Pour terminer, cela sera aussi une bataille de vision, entre les fidèles de Shadow, et nous Pciste, dont la main mise sur les performances matérielles reste primordiale, plutôt que de dépendre d'une entité supplémentaire, qui a la fâcheuse tendance à soustraire nos données, en plus de fournir une puissance en décas d'une expérience locale.

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